- Les Togians, enfin
!
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La première impression en arrivant dans l’archipel
est l’aspect vierge et sauvage des îles. Nous ne voyons aucun
village, le relief est assez marqué, et la foret primaire recouvre
le tout. C’est bien ce que nous étions venu chercher. Certains
îlots sont ourlés de plage de sable blanc. L’eau est d’un
bleu profond et laisse apparaître de temps en temps des verts tendres
indiquant la présence d’un récif juste sous la surface.
Enfin apparaît un îlot muni d’une longue digue en bambou,
avec des bungalows sur la plage. Il est abandonné. Juste après
se trouve Kadidiri, avec sa plage de sable blanc et son Black Marlin Dive
Resort. Yes! Nous sommes aux Togians !!
Christine et Wolf, 2 allemands responsables du club de plongée, nous
accueillent chaleureusement. Ils ne nous attendaient plus et ne savaient pas
où nous étions passé car il n’y a pas de téléphone
sur l’île. Le seul moyen de communication est une radio BLU qui
communique avec le bureau du resort à Gorontalo 2 fois par jour. Mais
tout va bien, il fait un temps splendide, 2 bungalows sont toujours à
notre disposition,1 pour les enfants 1 pour les parents c’est cool.
Bonne surprise, un couple de plongeur suisse francophone et leur 2 enfants
sont là aussi, nos enfants vont pouvoir se faire des amis et nous aussi.
De plus il y a un billard, le rêve pour Antoine.
Les bungalows sont très similaire à ceux de Bunaken, construits
en dur toutefois. La plage est juste devant avec la mer qui démarre
sur un herbier verdoyant, un platier de corail puis un tombant en pente mais
pas vertical. Le snorkeling est magnifique à 100 m devant le bungalow.
Nous voyons une tortue le premier jour, des napoléons, des perroquets
à bosse (bumphead parrot fish) qui sont très communs ici. Nous
observons plusieurs variétés de poissons empereur aux couleurs
fantastiques. Les poisons semblent plus gros qu’à Bunaken, et
cette impression se confirmera lors des plongées bouteille. Un serpent
de mer vadrouille devant la plage. Poissons pierre et poissons scorpion, très
venimeux, sont également présents dans peu d’eau. Il est
très déconseiller de marcher sur le platier de corail même
avec des chaussons.
Le soir, nous dégustons un cocktail à
la mangue sur notre terrasse en admirant le coucher de soleil, quand un banc
de dauphins s’ébrouent à quelques encablures de la plage.
Ce paysage n’a pas changer depuis des milliers d’années
sans doute, sa beauté sauvage et brute est intacte. Un sentiment de
plénitude nous envahi. Nous avons conscience de la fragilité
de cet endroit, très peu visité car très difficile d’accès.
Nous sommes des privilégiés pour pouvoir accéder à
cet endroit du monde, les Togians se méritent et c’est ce qui
les protège.
Le lendemain, nous partons plonger sur les fameux récifs barrière.
Les plongées sont assez variées, avec des tombants et des jardins
de corail. Nous voyons quelques tortues, beaucoup de poissons de belle taille
souvent en banc, des raies léopard et de multiples poissons de récif.
Nous entendons également quelques sourdes détonations sous-marine
qui nous rappelle les Philippines, c’est la pêche à la
dynamite ou bombing comme ils disent, qui consiste à balancer d’une
pirogue une bouteille type coca remplie d’engrais agricole type AZF,
avec une mèche et un détonateur. Le tout est jeté à
l’eau et pète à quelques mètres de profondeur.
Cette pêche est d’une rare stupidité : elle est très
inefficace car en aveugle et ne permet de capturer que de petit poissons.
De plus elle est très dangereuse pour le pécheur lui-même
et on ne compte plus ceux qui on une main en moins parce que la bouteille
à explosé plus tôt que prévu. Surtout elle détruit
le corail et en particulier le fragile corail en branche qui abrite les alevins.
C’est un fléau totalement illégal bien sûr, mais
qui va contrôler les pécheurs aux Togians ? Nous avons pu observer
de vastes zones réduites en miettes sur l’île de Mactan
aux Philippines, ce qui n’est heureusement pas le cas aux Togians où
cette pratique semble marginale.
Un autre jour, nous partons pour l’île de
Una Una, un volcan actif à 3 heures de bateau des Togians. Plongées
magnifiques autour d’un pinacle, on dirait une basse en Bretagne, qui
semble attirer toute la faune océanique : nombreux bancs de carangues,
barracudas, thons, gros mérous et j’en passe ! Le corail est
gigantesque, pas de trace de bombing. L’île qui fait 30 km de
circonférence est quasiment inhabitée. Je rencontre cependant
2 pécheurs de crevettes sur la plage de sable noir, dont l’un
parle assez bien l’anglais ! Il parle d’un ton calme et empreint
d’une grande sérénité. Il m’explique qu’il
est originaire de Una Una et y a toujours vécu. Il me parle de son
île et me dit qu’elle est pleine de trésors naturels. Par
exemple les oiseaux qui piaillent bruyamment dans les cocotiers au dessus
de nos têtes, ce sont des perroquets !! Effectivement en y faisant attention,
je vois le plumage multicolore de ces magnifiques oiseaux. Aveugle que je
suis, à ne regarder que sous l’eau où déjà
je ne vois pas tout, loin s’en faut. Bref ce gars qui n’a jamais
bougé de son île du bout du monde me donne une leçon de
modestie, bien involontairement. Il me dit qu’il apprend l’anglais
tout seul, step by step. Quel voyageur viendrait passer un mois rien que sur
cette île à jouer le Robinson pour tenter d’y découvrir
les richesses naturelles ? Mon ami le pécheur l’y aiderai sûrement,
step by step !
Retour vers les Togians sous une pluie diluvienne. La visi est nulle et le
capitaine navigue uniquement grâce à un compas de plongée…
Au chapitre des plongées, il faut signaler la
perle des Togians, une épave d’avion bombardier B24 qui gît
intacte par 22 m de fond. C’est une plongée rare, car l’avion
est dans l’eau depuis 60 ans et n’a pas été abîmé.
Il se trouve dans une baie bien protégée des vents. Les dive-masters
vous expliqueront toute l’histoire de cette épave.
Au global après une quinzaine de plongées aux Togians, je retiens
la pureté des sites, pas ou peu touchés par l’activité
humaine, la faune extrêmement variée. Les plongées sont
en dérive la plupart du temps. Pour observer les gros poissons il faut
descendre pas mal, à 40 m ou plus, sur des patates de corail détachées
du tombant. Là, au sommet de ces basses, en plein courant, les poissons
pélagiques abondent : thons, raies, carangues, barracudas et, encore
plus profond, requins. Le spectacle est magique mais il ne faut pas oublier
de remonter. Les blocs de 12 litres sont assez limitant. Heureusement la décompression
se fait dans des jardins de corail où nous faisons durer les paliers
bien au-delà du nécessaire. En fait je remonte généralement
que quand j’ai vidé mon bloc ce qui fait des plongées
de plus de 70 minutes.
Enfin, pour les plongeurs les plus confirmés et pour les instructeurs,
Wolf peut vous amener sur son site secret. C’est une remontée
rocheuse en pleine mer, culminant à 48 m sous la surface. Les flancs
de cette basse plongent dans le noir des abysses. Nous descendons jusqu’à
64 m sur ces tombants. C’est vraiment impressionnant. En y descendant,
j’ai vu plusieurs gros requins, un mérou malabar, des raies aigles,
des thons albacore et à dents de chiens, ainsi que les pélagiques
habituels. Il est possible d’y observer aussi avec de la chance des
raies mantas et des requins marteaux. La plongée est courte à
de telles profondeurs, et les paliers de décompression très
longs. La remontée, orchestrée par Wolf, s’est faite dans
des conditions de sécurité remarquable et même exemplaire.
Les plongeurs PADI, si souvent dénigrés par les cadres de la
plongée française, sont très compétents et savent
évoluer en intégrant les dernières méthodes utilisées
par les plongeurs tech, je peux en témoigner. A quand la possibilité
de plonger ainsi à 60 m pendant 40 minutes me dis je au palier ? Car
c’est un déchirement de devoir regagner la surface après
seulement 10 minutes passées à observer ce spectacle magnifique
et si rare, qui restera gravé dans ma mémoire.
Nous partons un jour en pirogue à moteur à
la découverte des villages sur les îles de l’archipel.
Plusieurs peuples, de différentes ethnies, habitent les Togians. Nous
rencontrons d’abord un village Baguios, entièrement sur pilotis
au-dessus de la mer. Les maisons sont petites, et semblent fragiles. Ce peuple
vit exclusivement de la mer, ce sont des pécheurs valeureux. Le capitaine
du bateau de plongée vient d’ailleurs de ce village.
Sur une autre île, nous abordons dans un village un peu plus grand,
peuplé d’un nombre impressionnant d’enfants. Ils sont très
beaux. Là aussi les maisons en bois sont sur pilotis, mais construites
à terre, dans un ordre très relatif. Ils vivent de la pêche,
en particulier des concombres de mer qu’ils font sécher pour
les vendre à des négociants chinois.
Nous visitons un 3ième village, de l’ethnie togian. Le village
est bien organisé, avec une rue et des séparations entre les
maisons construites en dur. Les traits de visage sont différents des
autres, avec des yeux très bridés. Ils parlent un dialecte spécial
et certains ne comprennent pas l’indonésien. Ils sont très
gentils et très accueillant. L’islam semble assez présent
et je vois plusieurs petites filles voilées portant un livre probablement
religieux écrit en arabe. Liraient elles l’arabe ?
Les îles Togians, si difficile d’accès, sont très
peu habitées. La population vit simplement, en communauté, en
harmonie avec la nature, généreuse, qui leur fourni le nécessaire
sans trop de travail. Les peuples semblent vivrent heureux, loin de notre
société de l’information, et sans les besoins insensés
de consommation que nous avons. Leurs règles de vie son basées
sur des coutumes ancestrales, qui ont fait leur preuve. Puisse le "progrès"
ne pas les polluer trop vite.
Les meilleures choses ayant une fin, nous quittons les îles Togians avec le ferry régulier cette fois, le KM Puspita qui fait la navette Togians-Gorontalo une fois par semaine, le lundi. Nous embarquons dans l’après midi, et nous installons dans une cabine que nous avions réservé à l’avance. L’ambiance à bord est très amusante, les passagers transportant des marchandises très diverses qu’ils entreposent dans le pont inférieur dans un joyeux désordre. Il y a même une mosquée à bord. Nous rencontrant quelques touristes français venant du second resort des Togians, Island Retreat. Nous dînons d’un gros crabe acheté à un indonésien qui en avait plein un sac. Délicieux ! Le voyage se passe sans problème grâce à notre cabine. En effet, dans la nuit le vent se lève et la pluie arrose copieusement le bateau. Un couple de jeunes français qui n’a pas pu avoir de cabine a passé la nuit dans les coursives baignant dans 3cm d’eau. Leurs têtes au petit matin en dit long sur la galère de la nuit. Arrivée vers 6h à Gorontalo où nous attend le gars de Black Marlin avec nos billets d’avion et un taxi. Transfert à l’aéroport et retour à Manado.